Prévention des cancers, des maladies
cérébro et cardio-vasculaires et des effets néfastes (alcoolisme, tabagisme…)
des drogues licites
Pour revenir au sommaire du site cliquez ici
Le texte qui suit peut être imprimé : il comporte 18 pages A4.
__________________________________________________________________________________
LA PRÉVENTION DES CANCERS
Qu’est-ce qu’un
cancer ? - ses causes - son évolution
Les causes cliniques
concrètes des cancers
Les cancers de divers
organes et leurs facteurs de risques
Les mesures pratiques
de prévention des cancers
Les mesures de
dépistage - chez les femmes
- chez les hommes
Le rôle des facteurs
psychologiques
Données
statistiques (Observatoire de veille sanitaire)
I - QU'EST-CE
QU'UN CANCER
Un cancer est une maladie due initialement à la perturbation d'une
cellule, ou d'un groupe de cellules de l'organisme, dont le
« cerveau » - le génome (ensemble des gènes) au sein du noyau
cellulaire - a été abîmé par des éléments d'agression chimiques, physiques ou
viraux provenant soit de l'environnement de l'individu, soit de l'intérieur
même de son organisme.
Les cancers sont des maladies de
l'homme mais aussi des animaux (particulièrement des animaux domestiques) et
des plantes (les galles sont les tumeurs les plus connues).
L'organisme humain est composé de
milliards de cellules qui forment une société organisée où chaque cellule -
unité de base - est un élément fort complexe. Cet élément a son propre rôle
mais, parallèlement, il est intégré dans un ensemble pour des fonctions
coordonnées.
Un cancer représente
véritablement une « indiscipline », une sorte de « folie » de
certaines cellules en rapport avec l'agression et le dommage dont elles ont été
victimes.
Cette détérioration intime des
cellules, qui va entraîner divers dysfonctionnements, représente le
dénominateur commun ou, en d'autres termes, la cause fondamentale ou théorique
de tous les cancers.
Quant aux éléments ou facteurs
susceptibles d'agresser et d'endommager ces cellules - ou les circonstances qui
vont permettre cette action néfaste - ce sont les causes cliniques ou causes
concrètes des cancers sur lesquelles va porter toute action de prévention.
En pratique, certains cancers
relèvent manifestement d'une seule cause clinique : on parle de cause
déterminante pour le cancer précis de tel individu ; dans beaucoup de cas, par
contre, on ne peut parler que de causes favorisantes, de causes probables, de
facteurs de risque qui, en s'associant au cours de la vie, contribuent au
déclenchement de la cancérisation. Le cancer de tel organe est toujours une
affection pluricausale (comme le sont la plupart des maladies).
Les cellules cancéreuses peuvent
présenter bien des anomalies, anomalies d'ordre morphologique et chimique
notamment, mais seules trois types de perturbations leur sont spécifiques.
1) La première perturbation porte sur leur reproduction.
Normalement, cette fonction
s'effectue par division pour assurer le remplacement des cellules qui meurent
perpétuellement :
- il y a pour les cellules des
morts naturelles « de vieillesse » (la durée de vie d'un globule
rouge du sang, par exemple, est de l'ordre de 100 jours, celle d'un globule
blanc de 8 à 10 jours).
- il y a aussi des morts dues à
la maladie ou à un traumatisme. Ainsi, après une blessure ayant entraîné une
perte de substance, la « réparation » s'effectue par la
multiplication des cellules de voisinage
Mais cette multiplication est
dirigée et contrôlée. Elle s'arrête automatiquement à un moment précis grâce à
un mécanisme régulateur.
(À noter que seules certaines
cellules nerveuses ne se reproduisent pas : ou bien elles vivent aussi
longtemps que l'organisme auquel elles appartiennent, ou bien elles meurent
sans être remplacées).
Dans un cancer le mécanisme régulateur
en question est perturbé : les cellules (dont les gènes, appelés oncogènes, sont lésés) se divisent et se
reproduisent sans cesse (sous l'action d'une substance découverte par Hamilton
en 1992, la télomérase, dite « enzyme de l'immortalité »). De plus,
dans cette néo-formation, les cellules sont disposées de façon anarchique. Il
s'ensuit la formation d'une « grosseur » : c'est la tumeur maligne ou
cancer (par opposition à la tumeur bénigne). A un rythme variable (où
interviennent des éléments de défense, les anti-oncogènes),
cette tumeur se développe de façon inexorable en l'absence de traitement.
2) La seconde perturbation est l'envahissement des tissus voisins par
les cellules cancéreuses.
Dans une tumeur bénigne, les
cellules anormales ne font que repousser les tissus de voisinage, ici elles
pénètrent à l'intérieur même de ces tissus, les dissocient et les détruisent
progressivement.
3) Enfin, les cellules cancéreuses peuvent essaimer à distance dans
d'autres organes.
Ces cellules sont, en effet,
capables de se détacher de la tumeur dont elles font partie, de passer dans le
courant sanguin ou lymphatique, et d'aller coloniser d'autres organes en
formant de nouvelles tumeurs. Ces tumeurs appelées « métastases »
vont se développer pour leur propre compte en reproduisant la tumeur initiale.
Assez souvent un cancer commence
par la transformation et la multiplication d'une seule cellule. Au dixième
doublement la population est d'environ 1 000 cellules cancéreuses, au bout du
vingtième doublement elle est d'environ 1 million. A ce stade la formation ne
représente pourtant qu'une très petite quantité de tissu : environ 1 mg. Un
petit nodule de un centimètre de diamètre, moins gros qu'une olive, est composé
d'environ un milliard de cellules anormales.
Le temps que prend la division
cellulaire étant connu, il est possible, quand on découvre un cancer, de
calculer approximativement la date d'apparition de la première cellule malade.
Même lorsqu'il est découvert très tôt par le patient ou le médecin, un cancer a
déjà plusieurs années d'existence (ce qui est le cas, en général, pour un
cancer tel que celui du sein).
Ainsi, pendant longtemps le
cancer n'entraîne aucun symptôme particulier, notamment aucune douleur, et il
est bien trop petit pour être découvert par les moyens dont nous disposons
actuellement.
À son début, un cancer est une maladie bien localisée dans un
organe. On peut alors, avant tout par la chirurgie qui est en général l'arme la
plus efficace, éliminer radicalement les cellules anormales et obtenir la
guérison. Il est nécessaire toutefois de pratiquer une mutilation plus ou moins
importante des tissus sains de voisinage infiltrés ou susceptibles de l'être
par les cellules cancéreuses.
À un stade plus tardif, le cancer devient une maladie régionale,
voire une maladie générale (en cas de métastases). Les traitements sont alors
plus complexes et les résultats plus aléatoires.
La gravité des cancers tient en somme à trois caractères :
- la prolifération perpétuelle et anarchique des cellules
responsable d'une « grosseur » qui ne cesse de se développer,
- l'envahissement et la destruction des tissus et organes voisins,
- les métastases reproduisant à distance le tumeur initiale.
Les tumeurs bénignes (verrues,
kystes, fibromes, goîtres...) sont, quant à elles, parfaitement limitées et
restent bien localisées dans un organe. Leur ablation complète - en respectant
intégralement les tissus sains de voisinage - est facile et leur guérison
habituelle.
(À noter que les cancers dont il
est question ici sont essentiellement les “carcinomes” : d'une part ce type de cancers est de très
loin le plus fréquent, d'autre part nos connaissances concernant les causes des
autres cancers (sarcomes, leucémies... ) sont très modestes : elles ne
permettent pas, sauf exceptions, d'envisager des mesures de prévention).
Si, compte tenu de leur
complexité, les mécanismes intimes de la cancérisation restent encore largement
ignorés, bien des facteurs de cancérisation nous sont parfaitement connus
aujourd'hui, ce qui est essentiel. Ces facteurs sont les suivants :
1) les agents chimiques
a
- la fumée de tabac ,
b
- les facteurs liés à l'alimentation ,
c
- les facteurs liés à l'environnement ,
d
- les facteurs liés à certains traitements ;
2) les facteurs hormonaux ;
3) les radiations ;
4) les virus ;
5) les parasites ;
6) l'hérédité ;
7) l'âge.
On considère actuellement que 70
à 80 % des cancers humains sont en rapport avec le mode de vie et plus
précisément avec des substances étrangères issues de l'environnement.
1) LES AGENTS CHIMIQUES
a - La fumée de tabac, par les hydrocarbures qu'elle contient
(le benzo-pyrène surtout), provoque des cancers concernant de nombreux organes
:
- bronches, œsophage, voies aéro-digestives
supérieures : bouche, pharynx, larynx...;
- vessie, rein, estomac, foie,
pancréas, côlon ;
- col de l'utérus, sein (selon
une étude américaine récente).
D'après certaines statistiques le
tabac serait responsable de 22 % des cancers.
b - Les
facteurs chimiques en rapport avec l'alimentation
Plusieurs études montrent que 1/3
des cancers, chez l'homme comme chez la femme, sont directement liés à
l'alimentation (donc partiellement évitables). Les facteurs en cause sont les
suivants :
- les hydrocarbures formés par l'utilisation de certaines formes de
cuisson, notamment :
- lorsque l'aliment est
directement en contact avec la flamme et la fumée (la plupart des fumées
contiennent des produits cancérogènes) ;
- lorsque la température de cuisson
est élevée (surtout pour les graisses animales) ;
- lorsqu'il y a carbonisation de
l'aliment.
- les boissons alcooliques (en France, plus particulièrement le
vin), par l'alcool qu'elles contiennent, favorisent de très nombreux cancers,
notamment ceux des voies aéro-digestives supérieures : bouche, pharynx,
larynx..., de l'œsophage, du foie, du pancréas, du sein... Le plus souvent, le
tabac est un cofacteur de cancérisation.
L'alcool se comporte soit comme un co-cancérogène (produit qui, à
lui seul, n'entraîne pas de cancer mais potentialise l'action d'un produit
cancérogène), soit comme réducteur des moyens de défense de l'organisme. De
plus, par son action anesthésique qui réduit la douleur et l'angoisse
physiologique du patient, il retarde le diagnostic et le traitement, retard qui
aggrave notablement le pronostic et entraîne une surmortalité.
- les nitrates qui interviennent dans le déclenchement des cancers
digestifs. On les trouve particulièrement dans les aliments salés ou fumés
ainsi que dans les légumes verts et les eaux polluées par les engrais utilisés
en agriculture. Sous l'influence des microbes, ces nitrates sont susceptibles
de se transformer dans l'organisme en produits cancérogènes, les nitrosamines.
- l'aflatoxine qui provient d'un champignon microscopique
(l'aspergillus flavus) poussant sur les céréales mal conservées et qui provoque
des cancers du foie.
Dans certaines études sont également suspectés, mais sans preuve
formelle : les pesticides
provenant de l'agriculture (une trentaine est répertoriée à l'heure actuelle), le café (dans les cancers du pancréas
et de la vessie), l'excès de graisses
(dans les cancers du sein, du corps de l'utérus, de l'ovaire, du côlon, de la
prostate, de la peau...).
c - Les
facteurs chimiques en rapport avec l'environnement
De très nombreux produits sont
connus ou suspectés. Les plus courants sont :
- l'amiante, le chrome (pour le cancer de la plèvre) ;
- les goudrons (pour les cancers de la peau, des poumons, du
sang...) ;
- le chlorure de vinyle (pour l'angiosarcome du foie) ;
- les poussières de bois, de cuivre, de nickel pour le cancer de
l'ethmoïde (du nez) ;
- l'arsenic (pour les cancers de la peau et du foie) ;
- le benzène, la dioxine ;
- le radon (pour le cancer du poumon). Il s'agit d'un gaz émis par
le radium, qui est présent dans certaines mines de Bohême et dans le sol des
régions granitiques telles que la Bretagne, la Vendée, le Limousin...
A noter que le cancer dont la
cause chimique fut reconnue la première fois a été le cancer du scrotum chez
les ramoneurs, cancer dû à la suie des cheminées (c'est la découverte de Sir
Percival Pott en 1775).
d - Les
facteurs chimiques en rapport avec certains traitements
Ce sont des produits utilisés :
- pour la chimiothérapie
anticancéreuse ;
- dans les traitements
immuno-suppresseurs (après des greffes).
2) LES FACTEURS HORMONAUX
Deux types d'hormones sont
potentiellement cancérogènes :
- les androgènes (hormones mâles)
;
- les œstrogènes (hormones femelles).
C'est ainsi qu'un certain
« déséquilibre » hormonal est susceptible d'être à l'origine de
certains cancers :
- chez la femme : cancers du
sein, du corps de l'utérus, de l'ovaire ;
- chez l'homme : cancer de la
prostate.
Ce déséquilibre peut être
« naturel » ou bien provoqué par les hormones utilisées pour la
contraception ou administrées comme traitement de la ménopause.
3) LES RADIATIONS
- Le soleil - par les rayons ultraviolets qu'il émet - peut
entraîner des cancers de la peau ;
- Les radiations ionisantes sont responsables :
. de cancers de la peau (les
mélanomes sont particulièrement graves) ;
. de cancers du sang (leucémies).
(Ces cancers se voient chez les
anciens radiologues qui travaillaient sans protection efficace, chez les Japonais
victimes de la bombe atomique, chez les personnels des centrales nucléaires en
cas d'accident, chez les malades traités par les radiations...).
4) LES AGENTS INFECTIEUX
Sont mis en cause :
- les virus des hépatites B et C
(pour le cancer du foie) ;
- le HPV (Human Papilloma virus)
- et accessoirement le virus de l'herpès- pour le cancer du col de l'utérus ;
- le EBV (virus d’Epstein Barr)
pour le cancer du rhino-pharynx et le lymphome de Burkitt (ce dernier cancer se
voyant essentiellement en Afrique) ;
- le VIH (virus du Sida) pour une
forme de lymphomes ;
- le HTLV pour une forme de
leucémie ;
- “Helicobacter pylori” pour le
cancer de l’estomac.
5) LES PARASITES
La bilharziose est une parasitose
transmise par le contact de la peau avec une eau contaminée, notamment lors des
bains. On la constate dans de nombreux pays. Elle est responsable de cancers de
la vessie.
6) L'HÉRÉDITÉ
L'hérédité intervient à des
degrés divers dans le déterminisme de toutes les maladies, y compris dans celui
des cancers qualifiés de sporadiques ou des cancers relevant d'une cause
environnementale évidente. Mais son rôle exact, compte tenu de l’extrême
complexité des éléments en cause) ne peut pas être parfaitement apprécié.
Cette hérédité (qui peut être
maternelle ou paternelle) est assez
bien identifiée actuellement dans :
- le cancer du sein (les gènes
sont situés sur les chromosomes 8, 13 et 17) ;
- le cancer du côlon et du rectum
(les gènes sont sur les chromosomes 2 et 5) ;
et reconnue notamment dans :
- le cancer de l'ovaire ;
- le cancer du col de l'utérus ;
- le cancer de la prostate ;
- le cancer du rein...
Cependant il faut comprendre que
l'hérédité n'est pas une fatalité. Dans le pire des cas, le risque est de 50 % et
non de 100 %. La prédisposition est héréditaire, non les cancers eux-mêmes. Si
l'une des étapes est transmissible, puisqu'il existe une mutation cellulaire
constitutionnelle, le développement d'un cancer exige que s'accumulent des
mutations supplémentaires dans les cellules prédisposées. L'environnement joue
alors un rôle considérable. La surveillance préventive des populations à risque
est donc particulièrement utile (avec éventuellement des essais de
chimio-prévention).
7) L'ÂGE
Il constitue par lui-même un
facteur de risque en entraînant une altération de tous les tissus.
8) LA SOUS-ALIMENTATION
Elle peut être incriminée dans
certaines populations pauvres du fait des carences alimentaires en certains
facteurs considérés comme protecteurs (les vitamines C, E, P, certains éléments
tels que le sélénium, le manganèse, le zinc...). Les mécanismes de
cancérisation sont sans doute représentés par une dépression immunitaire (qui
rend les tissus vulnérables aux actions cancérogènes) et une insuffisance de
détoxication par le foie.
Le graphique suivant résume
l’essentiel des facteurs de cancérisation :
-----------------------------------------------------Pour revenir au sommaire cliquez ici
ET LEURS FACTEURS
RESPECTIFS DE RISQUES
LE CANCER DU SEIN
En présence d'une femme
présentant un cancer du sein, il n'est pas possible, en général, d'établir avec
précision la cause déterminante de sa maladie car, comme dans beaucoup de
cancers, divers facteurs ont pu intervenir dans le processus de cancérisation
sans qu'il soit possible d'apprécier leur responsabilité respective. Les
facteurs connus sont les suivants :
- l'hérédité.
Le rôle joué par l'hérédité dans le
risque d'apparition du cancer du sein ne fait plus l'objet de discussions : on
considère que les femmes dont la mère ou une des sœurs ont eu un cancer du sein
(surtout si le cancer est apparu avant 40 ans) sont plus exposées à cette
tumeur que les autres femmes. Le risque est multiplié par 3 à 4 lorsque la mère
seule a été atteinte, multiplié par 7 environ lorsque la mère et une sœur ont
été atteintes.
Néanmoins ce risque héréditaire
reste statistiquement faible : une femme sur 20 atteinte d'un cancer du sein,
ou une femme sur 200 dans la population générale, a une prédisposition
génétique. Cette prédisposition est le plus souvent d'origine maternelle,
parfois d'origine paternelle.
- l'alimentation
Divers éléments sont
particulièrement mis en cause dans de nombreuses études :
- l’apport alimentaire
énergétique trop important en graisses animales (on constate que les femmes
obèses font plus de cancers du sein que les autres) ;
- l’apport insuffisant en
produits végétaux (les femmes végétariennes sont particulièrement protégées) ;
- l’usage des boissons
alcooliques (présent dans la plupart des études, ce facteur s'avère même très
important dans certaines d'entre elles).
- l'absence de grossesse
La grossesse et la lactation,
surtout avant 35 ans, ont un rôle protecteur. Le risque de cancer serait de 0,6
pour une grossesse avant 24 ans, de 1,2 pour une grossesse après 30 ans. Selon
l'hypothèse la plus courante la grossesse et la lactation entraîneraient une
« maturation » de la glande mammaire.
- l'administration d'œstrogènes dans la pilule anticonceptionnelle ou
lors de la ménopause
Le risque théorique est toujours important d’administrer à une femme des œstrogènes lorsque son statut hormonal est normal – ce qui est le cas habituel – puisque on créée nécessairement un déséquilibre et que les hormones en question, comme il est dit plus haut, sont potentiellement cancérogènes (découverte de Lacassagne en 1933, donnée confirmée depuis lors par de multiples expériences chez l’animal et chez l’homme et reprise par le Centre international de recherche sur le cancer en 2005, mais encore très méconnue).
Quant au risque pratique, diverses études récentes permettent de l’apprécier. Ce sont
1) celle de l’American Medical Association de septembre 2002 et de mai 2003 concernant l’administration d’hormones lors de la ménopause
2) celle du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) d’août 2005 concernant la contraception hormonale et l’administration d’hormones lors de la ménopause.
1) Étude de l’American Medical
Association de septembre 2002 concernant l’administration d’hormones lors de la
ménopause concernant 16 608 femmes
au plan des inconvénients :
- une augmentation des cancers du sein : de 26 % (38 cas pour 10 000, contre 30 chez les femmes n’ayant pas eu ce traitement),
-
une augmentation des infarctus du myocarde : de 29 % (37 cas pour
10 000, contre 30 chez les femmes n’ayant pas eu d’hormones)
-
une augmentation des accidents vasculaires cérébraux : de 41 % (29
cas pour 10 000 contre 21 chez les femmes .
au plan des bénéfices :
- une réduction des cancers du côlon : de 37 % (10 cas au lieu de 16 cas pour 10 000 femmes
- une réduction des fractures du col du fémur : de 24 % (10 cas au lieu de 16 cas pour 10 000 femmes)
Pour les auteurs de cette étude le rapport bénéfice/risque n’est pas en faveur du traitement.
.
Deux autres études (publiées de nouveau dans le Journal de l'American Medical Association du 28 mai 2003) précisent que la thérapie hormonale accroît le risques de démence ou d’accident cérébral.
. dans la première étude ayant porté sur 4 532 femmes les auteurs écrivent : « Au total, le risque de démence pour les femmes prenant œstrogène et progestérone est le double de celui prenant le placebo ».
. dans la seconde étude, ayant concerné 16 608 femmes en bonne santé de plus de 50 ans, le risque d’attaque cérébrale est augmenté de 31 % chez les femmes ayant suivi un traitement hormonal. (risque de 1,8 %) tandis que ce risque est de 1,3 % chez celles ayant reçu un placebo.
Il
faut noter que la justification médicale d'œstrogènes lors de la ménopause
reposait jusqu’ici sur le fait que ces hormones étaient susceptibles de
protéger la femme vis-à-vis de deux risques notables : l'ostéoporose
(responsable de fractures) et les accidents vasculaires. Cette étude semble
donc confirmer l’intérêt des hormones en ce qui concerne la prévention de
l’ostéoporose mais, en revanche, elle vient nettement l’infirmer dans la
prévention cardio-vasculaire
2) Étude du Centre international de
recherche sur le cancer (CIRC) d’août 2005 concernant à la fois la
contraception hormonale et l’administration d’hormones lors de la ménopause.
- une décision est prise : les
hormones utilisées (œstrogènes et progestatifs en association) dans la contraception
ou lors de la ménopause sont classées dans le groupe 1 des produits
cancérogènes, groupe le plus élevé dans l’échelle en vigueur.
- ses conclusions sont les
suivantes :
dans la pilule
anticonceptionnelle.
. l’étude analyse une
soixantaine d’études soit porte sur 60 000 femmes
. il existe une
légère augmentation du risque du cancer du sein ; dix ans après la
fin de l’utilisation le risque semble être redevenu identique à ce qu’il était
avant utilisation
. le risque de cancer
du col de l’utérus augmente avec la durée d’utilisation des hormones
. le risque de cancer
du foie subit une faible augmentations
. le risque de cancer
de l’endomètre (cancer du corps de l’utérus) et de cancer de l’ovaire
est légèrement réduit
lors de la ménopause
. un accroissement du
risque de cancer du sein
. ce risque s’accroît
avec la durée d’utilisation
. ce risque est
supérieur à celui qu’il serait avec l’utilisation des seuls œstrogènes
. une augmentation du
risque de cancer de l’endomètre si les progestatifs sont pris moins de
dix jours par mois
Certaines études mettent aussi en
cause le tabac.
Quelques données statistiques concernant le cancer du sein :
-
c’est le cancer le plus fréquent : 42 000 cas en 2000.
- le nombre de nouveaux cas diagnostiqués augmente
de 3 à 4 % par an ;
- traditionnellement rare avant 35 ans et frappant
particulièrement les personnes âgées, il est devenu aujourd'hui non
exceptionnel avant 25 ans tandis que les femmes non ménopausées représentent 50
% des cas ;
- lorsque la tumeur est de bon pronostic (petite
taille, ganglions non envahis, grade 1), le risque de rechute est inférieur à
20 % à 10 ans, tandis qu'en cas de tumeur avancée le risque est de 75 % ;
- la majorité des rechutes surviennent dans les 2 à
3 premières années et ce sont les plus graves : de 10 % par an au début, ce
taux de rechute diminue à 2-5 % au-delà de 5 ans ;
- en dépit des progrès récents réalisés dans le
dépistage, le diagnostic précoce et le traitement, la diminution du taux de
mortalité est assez faible ;
- le taux de guérison est de l'ordre de 50% sur 10
ans, tous stades réunis.
LES CANCERS DE L'UTÉRUS
Il faut distinguer deux
localisations particulières :
- le cancer du col ;
- le cancer du corps.
LE CANCER DU COL
Le papillomavirus semble être en
cause dans la plupart des cas.
Les facteurs de contamination ou
de risque sont :
- la précocité des rapports sexuels et la multiplicité des partenaires
;
- la pilule œstro-progestative anticonceptionnelle. Elle est mise
en cause dans toutes les études, surtout en cas d'utilisation précoce. Dans la
très importante étude britannique portant sur 52 000 femmes (publiée le 10
novembre 2007 dans The Lancet) « le risque relatif pour une
prise d’au moins cinq ans est de 1,90 : il est donc pratiquement
doublé ». Le cancer du col étant d’origine virale il est logique de
penser que les hormones sexuelles
favorisent l’action cancérogène du virus ;.
- la mauvaise hygiène de la femme et de son partenaire ;
- le tabac. D'après une étude anglaise l'explication en serait que
la cotinine, produit du métabolisme de la nicotine, est retrouvée dans les
secrétions du col de l'utérus.
La mortalité de ce cancer est en régression, sauf dans les pays sous-développés.
Le cancer du col chez la femme
jeune est encore de pronostic redoutable : le traitement est assez peu
efficace.
LE CANCER DU CORPS (cancer de l'endomètre)
Ses facteurs de risque,
différents de ceux du cancer du col, sont représentés par :
- l'administration des œstrogènes
lors de la ménopause ;
- un apport alimentaire trop
important en graisses animales.
LE CANCER DE L'OVAIRE
Les facteurs de risque
connus sont représentés par :
- la stimulation ovarienne dans le traitement des stérilités ou après
une contraception hormonale ayant bloqué l’ovulation ;
- le traitement de la ménopause (d'après certaines études).
À noter que les grossesses,
l'allaitement ainsi que les contraceptifs oraux, tous facteurs qui suppriment
momentanément l'ovulation, sont associés à une diminution du risque.
Ce cancer est en nette
augmentation en France : en 1970 la mortalité était de 1 595, en 1990, de 3
129. Il se constate surtout après la ménopause. Son diagnostic est difficile
car l'organe est profond. Le pronostic est redoutable
LE CANCER DE LA PROSTATE
Ce cancer est dépendant des
androgènes mais ses causes favorisantes restent inconnues. On sait néanmoins
qu'il existe une prédisposition génétique.
Quelques études ont mis en
cause certains facteurs alimentaires (les viandes rouges et les graisses
animales) et quelques produits toxiques (tel l'acrylonitrile utilisé dans la
fabrication des fibres synthétiques).
C'est le deuxième cancer de
l'homme par sa fréquence et par la mortalité dont il est responsable.
LE CANCER DU POUMON
Les facteurs de risques
sont représentés par :
- la fumée de tabac. Elle constitue, dans la très grande majorité
des cas, la cause déterminante de ce cancer : comme la plupart des fumées elle
contient des hydrocarbures cancérogènes.
- les poussières de radium et de pechlende (dans certaines
mines...) ;
- le radon. Ce gaz a fait l'objet en 1998 d'une réglementation
précisant les seuils officiels de contamination dans les habitations.
- enfin, un régime riche en graisses semble également représenter dans les
statistiques un facteur favorisant de ce cancer.
Quelques données statistiques concernant le cancer broncho-pulmonaire
en France :
- c'est ce cancer qui a progressé le plus dans les
dernières années, notamment chez les femmes ;
- son pronostic est toujours
redoutable (moins de 10 % de guérisons) ;
- le dépistage
systématique est décevant voire inutile. Seules se sont améliorées les
techniques (fibroscopie, ponctions radioguidées, scanner, échographie, IRM)
effectuées pour le diagnostic et le bilan des lésions.
LES CANCERS DE LA BOUCHE, DU PHARYNX ET DU LARYNX
La fumée de tabac représente le facteur causal essentiel dans la
plupart de ces cancers mais les boissons
alcooliques (le vin dans la quasi-totalité des cas en France) jouent à
l'évidence un rôle hautement favorisant. Il y a multiplication du risque
lorsque ces deux facteurs sont présents. Ces cancers sont en nette augmentation
chez l'homme et chez la femme.
LE CANCER DE L'ŒSOPHAGE
Le tabac et les boissons alcooliques représentent également les deux
causes essentielles de ce cancer.
Il est en augmentation chez la
femme.
LE CANCER DE L'ESTOMAC
La fréquence du cancer de
l'estomac a diminué de façon significative depuis quelques années, tout au
moins dans les pays où les modes de conservation des aliments ont évolué.
Une meilleure hygiène et
l'utilisation du froid qui préviennent l'un et l'autre la pullulation
microbienne, la réduction des salaisons (le sel brut contient souvent des
nitrates et des nitrites susceptibles de donner des nitrosamines cancérogènes)
et une alimentation équilibrée, semblent jouer un rôle essentiel dans cette
évolution favorable.
En France, ce cancer entraîne
néanmoins la mort de 10 000 personnes par an.
LE CANCER DU CÔLON ET DU RECTUM
Les facteurs de risques sont
représentés par :
- le tabac. Le risque, d'après des études récentes, semble même se
prolonger très longtemps après l'arrêt du tabac.
- les graisses. Elles interviennent probablement, d'une part en
facilitant la prolifération microbienne, d'autre part en augmentant la
sécrétion et la concentration intra-intestinale des acides biliaires (ces
acides biliaires peuvent se transformer en co-carcinogènes sous l'influence des
bactéries intestinales).
- un régime pauvre en fibres, notamment en cellulose des légumes et
en pectine des fruits. Ce régime ralentit le transit intestinal, réduit le
volume fécal et, de ce fait, augmente la concentration et l'action des
substances carcinogènes provenant presque inévitablement de l'alimentation.
- l'hérédité. On connaît deux formes familiales : le cancer sur
polypes intestinaux et le cancer familial non polyposique. Les gènes en cause
ont été localisés respectivement sur les chromosomes 5 et 2.
Le cancer recto-colique est en
augmentation chez l'homme et la femme.
LE CANCER DU FOIE
Les facteurs connus pour être
responsables de ce cancer très grave sont :
- l'hépatite B et l'hépatite C ;
- les boissons alcooliques. D'une part l'hépatite alcoolique fait
volontiers le lit de ce cancer, d'autre part l'alcool est un solvant de
certaines substances directement cancérogènes.
- les nitrates et nitrites présents dans certains végétaux
alimentaires et provenant de l'agriculture. Ces produits peuvent se transformer
en nitrosamines cancérogènes. À ce propos on peut souligner que, si les eaux sont
étroitement surveillées par les pouvoirs publics, il n'en est pas de même des
végétaux.
- l'arsenic, le chlorure de vinyle ;
- l'aflatoxine, produit déjà signalé antérieurement. Son action est
directement cancérogène sur le tissu hépatique.
LE CANCER DU PANCRÉAS
- les boissons alcooliques représentent la cause principale de ce
cancer ; il se greffe généralement sur une pancréatite chronique qui, dans 85%
des cas, est d'origine alcoolique. Toutefois, ce cancer peut se développer
aussi sur un pancréas sain.
- le tabac est également mis en cause dans de nombreuses études.
Ce cancer, dont le pronostic est
très défavorable, est en progression.
LE CANCER DE LA VESSIE
Ce cancer, par sa fréquence, est
chez l'homme le quatrième et le huitième chez la femme. Sont incriminés comme
agissant directement par leurs capacités cancérogènes :
- le tabac ;
- la phénacétine (médicament utilisé comme antalgique) ;
- la bilharziose (parasitose sévissant dans certains pays ).
Par ailleurs, les boissons
alcooliques et le café (quand il est associé au tabac) sont également mis en
cause dans certaines études.
LES CANCERS DE LA PEAU
Sont notamment en cause :
- les radiations ionisantes après radiothérapie ou exposition
prolongée ou massive ;
- les radiations ultra-violettes présentes notamment dans la lumière
solaire ;
- divers produits chimiques : les goudrons, l'arsenic…
-----------------------------------------------------Pour revenir au sommaire cliquez ici
IV - LES
MESURES PRATIQUES CONCERNANT
Découlant des
connaissances acquises cette prévention repose sur un certain nombre de mesures
prioritaires :
1 - NE PAS FUMER
et protéger les enfants de la
fumée provenant de l'entourage : ce tabagisme dit « passif » est à
lui seul responsable de cancers.
2 - PRÊTER PARTICULIEREMENT ATTENTION À SON ALIMENTATION.
- consommer essentiellement des boissons sans alcool.
L'alcool est un toxique de
puissance « moyenne » dont la prohibition absolue n'est pas justifiée
chez l'adulte sain, mais dont l'usage appelle toujours une grande
circonspection. Une boisson telle que le vin, par exemple, qui contient 12 à 13
% de son volume en alcool éthylique, ne doit donner lieu qu'à une consommation
non habituelle et très réduite, d'une part pour que l'alcoolémie résultant de
l'absorption ne dépasse pas 0,20 gr/litre, d'autre part pour éviter le
phénomène redoutable de l'accoutumance.
Compte tenu de ces données, il
faut considérer que la seule justification d'user - occasionnellement et en
faible quantité - d'une boisson contenant de l'alcool, est, en définitive, une
considération d'ordre esthétique quand cette boisson est susceptible d'apporter
un plaisir d'ordre gustatif.
Contrairement à une opinion qui
se répand aujourd'hui, il faut noter par ailleurs que l'action potentiellement
favorable d'une petite dose quotidienne d'alcool sur les artères ne suffit en
aucune manière à en légitimer la consommation. D'une part, de nombreux produits
alimentaires dépourvus de toute toxicité sont susceptibles de protéger les
vaisseaux sanguins, d'autre part l'alcool se comporte toujours comme un produit
toxique pour les cellules du système nerveux central, système bien plus fragile
et plus précieux encore que le système artériel.
- ne consommer qu'assez rarement certains produits : les salaisons, les
aliments frits, et ceux qui ont été en contact avec la flamme ou la fumée
(comme avec les barbecues et les grils horizontaux où la graisse tombe sur le
foyer ;
- éviter de cuire habituellement les aliments à une température élevée (notamment
dans la poêle) : utiliser de préférence les techniques de cuisson au
bain-marie, à l'eau, à la vapeur, au four à micro-ondes où la température est
de 100 à 130° ;
- éviter la consommation des viandes et de leur jus de cuisson ayant
subi une certaine carbonisation - protéger certains aliments cuits au four
en les recouvrant de papier adéquat - éliminer par grattage la croûte noire qui
se forme sur la viande car c'est à cet endroit que se trouvent les substances
cancérogènes...
- consommer fréquemment des légumes et fruits frais riches en fibres ;
- réduire la consommation des aliments riches en matières grasses
(surtout en matières grasses d'origine animale). Cette consommation est
habituellement trop importante.
- diminuer la consommation des aliments riches en glucides simples (aliments
sucrés) en privilégiant ceux qui sont riches en glucides complexes ;
- réduire d'une manière générale les apports alimentaires (toujours
par rapport à la tendance habituelle) et varier ces apports ;
- consommer des aliments neutralisant les nitrites : fruits et
légumes riches en vitamine C, alliacés (oignons, ail...), son de blé...
À noter que la plupart de ces recommandations en matière d'alimentation
sont également valables pour la prévention des maladies cérébro et
cardio-vasculaires qui représentent la première cause de mortalité en France.
PAR AILLEURS
- considérer que l'utilisation des hormones sexuelles féminines, soit par convenance personnelle dans la contraception, soit lors de la ménopause, comporte un risque accru de certains cancers, puisque dans les deux cas l'organisme féminin est en présence d'un surcroît non physiologique d'œstrogènes. Cette utilisation appelle toujours une surveillance attentive.
- un vaccin anti-HPV est
maintenant disponible pour la prévention du cancer du col de l’utérus. Pour l’instant, il s’adresse en priorité aux
jeunes adolescentes, avant le début de leur vie sexuelle. Les adolescents
pourraient également être sollicités, car bien que ne souffrant pas directement
de cette infection, ils servent souvent de "réservoir" et peuvent la
transmettre.
- à partir de 50 ans, les hommes doivent prêter attention à certains
troubles urinaires :
. envies fréquentes et
impérieuses d'uriner surtout la nuit ;
. diminution de la force du jet
d'urine ;
. difficulté ou retard pour
uriner...
Le plus souvent ces troubles sont
en rapport avec un adénome (tumeur bénigne de la prostate qui exige néanmoins
un traitement médical ou chirurgical pour éviter des complications graves),
mais il s'agit parfois d'un cancer.
- éviter les expositions solaires prolongées et se protéger
efficacement des coups de soleil.
- se protéger des produits qui peuvent être nocifs :
. par voie respiratoire :
poussières, vapeurs, gaz (notamment le radon par l’aération et la protection
des sols des habitations dans les régions concernées par le risque) ;
. par voie cutanée (particulièrement dans certaines activités industrielles ou agricoles).
- avoir une certaine
activité physique semble avoir une action préventive concernant plusieurs
cancers, notamment celui du sein (d’après
l’étude E3N initiée par l’INSERM entre 1990 et 2002 et menée sur près de 100
000 femmes affiliées à la MGEN (Mutuelle Générale de l’Éducation Nationale).
L'APPRÉCIATION DU RISQUE GÉNÉTIQUE
Il existe actuellement, dans
certains centres, des consultations destinées à évaluer, à l'aide de tests, le risque
cancérologique d'ordre génétique.
Dans la population générale les
examens en question ne se justifient pas, compte tenu du faible niveau de
risque (pour la plupart des cancers), du coût important des tests utilisés et
de l'angoisse qu'ils peuvent susciter. Par contre, dans les familles où le
risque héréditaire semble exister, cette recherche permet soit de rassurer
certains membres en excluant pour eux ce risque génétique, soit de conseiller,
pour les autres, un suivi médical renforcé.
Il faut savoir qu'à l'heure
actuelle l'établissement d'un risque ou d'une absence de risque génétique pose
aux médecins des problèmes multiples et complexes, notamment pour le cancer du
sein familial. La mammectomie bilatérale (ablation des deux seins) volontiers
pratiquée dans un but préventif aux États-Unis, reste exceptionnelle en France
et rare dans l'ensemble de l'Europe. Elle demeure très discutée dans la mesure
où le bénéfice est tout à fait incertain et la mutilation importante. Il
apparaît, en effet, que 10 à 20 % des femmes (recensées dans les familles
porteuses de gènes néfastes) atteignent 70 ans sans avoir développé ce cancer.
Pour le cancer de l'ovaire, le
problème est un peu différent car le pronostic est particulièrement grave et la
chirurgie moins traumatisante. L'ovariectomie peut être proposée à partir de 40
ans, âge en deçà duquel la maladie d'ordre héréditaire est exceptionnelle.
Il reste que l'évaluation
statistique du risque de cancer, à partir des données génétiques, n'est pas
très satisfaisante dans l'état actuel de nos connaissances. Elle trouvera sa
pleine justification lorsqu'on pourra éviter l'apparition de ces tumeurs par
une chimiothérapie ou une immunothérapie préventives, techniques du futur
encore balbutiantes. À ce propos, le tamoxifène,
produit anti-œstrogène utilisé dans le traitement du cancer du sein, semble
efficace en matière de prévention chez les personnes à risques, selon une étude
menée récemment aux Etats-Unis. Néanmoins, l'hypothèse d'un risque associé de
cancer du corps de l'utérus et d'embolies pulmonaires a fait douter jusqu'ici,
en France notamment, du bien-fondé de son utilisation dans une perspective
préventive.
Ce dépistage est particulièrement
important car de sa précocité va souvent dépendre l'efficacité ou la
non-efficacité du traitement mis en oeuvre et la guérison ou non-guérison du
malade.
Il faut noter à ce propos que,
dans d'assez nombreux cas de cancers, le premier trouble ressenti par le malade
est une simple gêne, une petite douleur, une perturbation banale d'une fonction
quelconque. Pendant longtemps, ce trouble reste de faible intensité, de sorte
que sa reconnaissance par le patient comme un signal d'alarme l'amenant à
consulter, dépend grandement de l'état neuro-psychique de l'intéressé. Plus son
système nerveux est sain, plus il est apte à enregistrer précocement le trouble
en question soit sous forme de douleur physique, soit sous forme d'une certaine
préoccupation face au trouble ressenti. Réciproquement, plus le système nerveux
est altéré, plus tardif est le diagnostic et le traitement.
La qualité du système nerveux est
évidemment très variable suivant les individus... Il peut être modifié et
altéré par de très nombreux facteurs au cours de la vie. Mais les plus courants
sont évidemment les drogues neuro et psychotropes et, parmi elles, l'alcool qui
est un anesthésique et un tranquillisant.
Si, comme nous l'avons vu,
l'alcool, en tant que produit co-cancérogène, favorise par lui même la
formation de divers cancers, c'est aussi le principal facteur de retard du
diagnostic et partant d'échec thérapeutique. D'où l'importante sur-mortalité
des consommateurs habituels de boissons alcooliques et, en France, des
consommateurs de vin. Il ne fait pas de doute que de nombreux cancers, relevant
de causes autres que l'alcool, guériraient si les sujets n'avaient pas été des
consommateurs habituels de boissons alcooliques.
CHEZ LES
FEMMES
1 -- Le dépistage du cancer du
sein :
Les recommandations actuelles
sont les suivantes :
- chez les femmes - ne présentant
pas de risque héréditaire et n'ayant pas utilisé d'œstrogènes - la surveillance
basée sur l'auto-examen, un examen clinique annuel et une mammographie (tous
les 2 à 3 ans) est recommandée à partir de 50 ans ;
- lorqu'il existe des antécédents
familiaux ou certains des facteurs de risques signalés plus haut, notamment
l'utilisation de la pilule anticonceptionnelle, cette surveillance est
recommandée à partir de 30 ans.
En
ce qui concerne l'auto-examen des seins pour la recherche d'une grosseur
anormale il s'effectue de la manière suivante :
- tout d'abord, torse nu devant
une glace, la femme apprécie la forme de ses seins et leur symétrie ainsi que
l'aspect du mamelon qui ne doit pas être rétracté, ni présenter croutelle ou
eczéma. Par ailleurs, il ne doit y avoir aucun écoulement spontané ou à la
pression ;
- ensuite, en position allongée
sur un lit, avec un coussin sous les épaules, elle effectue de petits
mouvements circulaires sur toute la surface du sein en ayant bien soin de
palper avec la main bien à plat. Le sein gauche est palpé avec la main droite,
le sein droit avec la main gauche.
2 - Le dépistage du cancer du
col de l'utérus
- chez les femmes de 20 ans à 65
ans ayant eu une activité sexuelle, il repose sur l’un et/ou l’autre des
deux examens suivants :
. un examen cytologique, effectué
tous les 3 (rythme optimal) à 5 ans ;
. un test HPV (détection du
papillomavirus humain) dont la sensibilité est supérieure à celle de l’examen
cytologique
- avant 20 ans le dépistage
relève de la surveillance individuelle ;
- le dépistage peut être arrêté à
65 ans si la surveillance a été régulière et les résultats normaux.
Tout résultat anormal demande un
examen diagnostique complémentaire, une surveillance ou/et un traitement des
lésions dépistées.
Par ailleurs, en période
d'activité génitale, toute perte de sang en dehors des règles et après la
ménopause toute reprise du saignement, appelle une consultation médicale.
CHEZ LES
HOMMES
Le dépistage du cancer de la
prostate repose essentiellement sur le toucher rectal pratiqué une fois par an
à partir de 50 ans. (l'Association Américaine de Cancérologie, en mai 1994, le
recommande à partir de 40 ans s'il existe des antécédents familiaux). Cet
examen est éventuellement associé à une échographie.
On dispose d'un test : le dosage
de l'antigène spécifique de la prostate (P.S.A.), mais sa valeur n'est qu'un
élément d'appoint pour le diagnostic en association avec le toucher rectal.
L'intérêt de cet examen réside essentiellement dans le suivi thérapeutique d'un
cancer prostatique. Dans une perspective diagnostique, c'est son augmentation
rapide qui est l'élément le plus intéressant.
Remarque : À partir de 70
ans la détection précoce du cancer de la prostate ne semble pas utile: le
traitement chirurgical ou radiothérapique ne se traduit pas obligatoirement par
un gain en espérance de vie (car l'évolution de ce cancer peut être très lente)
ou en qualité de vie (car le traitement n'est pas anodin). Dans ces
circonstances, l'attitude des médecins est déterminée au cas par cas.
CHEZ
TOUS
Il convient de consulter
impérativement un médecin :
- en cas de troubles persistants
tels que gêne dans la bouche, toux, enrouement, troubles du transit intestinal,
amaigrissement, douleur persistante...;
- en cas de modification d'un «
grain de beauté » : modifications de forme, de couleur, de taille...
Pour les personnes ayant des
antécédents familiaux de cancer colique une surveillance particulière s'impose.
Une coloscopie est recommandée tous les trois ou cinq ans à partir de 35-40
ans. De plus, il existe un examen simple de laboratoire, l'Hémocult*, qui est
destiné à détecter des saignements microscopiques dans les selles.
Pour les sujets transplantés une surveillance attentive doit également être envisagée : 5 à 6% d'entre eux présentent des cancers liés au traitement immuno-suppresseur. Tous les organes peuvent être atteints.
-----------------------------------------------------Pour revenir au sommaire cliquez ici
VI - LE RÔLE DES FACTEURS PSYCHOLOGIQUES
EN MATIÈRE DE
CANCERS ?
Quelques rares études se sont
donné pour but d’explorer ce sujet difficile. Parmi elles citons celle de
l'Américain Fawzy en 1993 sur l’évolution des cancers déclarés.
Dans cette étude :
- l'état psychologique des
patients a été apprécié à l'aide de divers tests ;
- le niveau immunitaire a été déterminé par le comptage des cellules “
tueuses ” que possède l'organisme (cellules NK = Natural Killers)
Les observations ont été les
suivantes :
1) Au début, à l'annonce du diagnostic, de façon assez surprenante, un
niveau élevé de détresse affective est prédictif d'une plus faible fréquence de
récidive et d'une plus grande probabilité de survie. Il semble que le malade
présentant une détresse affective peu marquée à ce moment-là ait tendance, en
général, à minimiser sa maladie. Dans cet état d'esprit, il ne mobilise pas
toutes ses ressources d'énergie et n'adopte pas toujours un comportement lui
permettant de supporter les conséquences pénibles des traitements.
Plus tard, dans les mois qui suivent l'intervention chirurgicale,
un faible niveau de détresse affective est associé, par contre, à une meilleure
évolution à long terme.
2) Il y a un lien entre le nombre
de cellules “ tueuses ” et le risque de récidive : plus le niveau de ces
cellules est élevé, plus le risque de récidive est faible
On peut donc penser avec l’auteur
de l’étude - comme le suggère parfois l’expérience clinique - que les facteurs
psychologiques : détresse affective, aptitude à faire face à la maladie…
peuvent avoir une influence sur l'évolution des cancers déclarés, voire sur
l’apparition des cancers, cela par l’intermédiaire du système immunitaire de
défense de l'organisme.
Ces données très intéressantes ne débouchent pas sur des mesures pratiques de prévention mais elles incitent manifestement à ce que la prise en charge d’un cancéreux ne néglige pas l’aide psychologique.
-----------------------------------------------------Pour revenir au sommaire cliquez ici
VII - DONNÉES STATISTIQUES
entre 1980 et 2000 :
progression du nombre de
cancers : 63%
la croissance démographique et le
vieillissement n’expliquent pas à elles seules cette progression
chez
les hommes progression de 66 % ; chez les femmes de 60 %
progression des décès : 20 %
en 2000 : 280 000 de nouveaux cas
hommes : 58 %
femmes : 42 %
en
2000 : 150 000 décès (soit 61 % chez les hommes)
cancers
les plus fréquents :
le
cancer du sein : 42 000 cas
le
cancer de la prostate : 40 000 cas
le
cancer colo-rectal : 36 000 cas (il représente le second
"tueur")
le
cancer du poumon : 28 000 cas (et qui représente le premier
"tueur")
diminution
chez les hommes
des
cancers des voies aéro-digestives supérieures
de
l’œsophage
de
l’estomac
diminution
chez les femmes
du cancer de l’estomac
les
cancers : première cause de mortalité chez les hommes (32 %) ;
seconde cause chez les femmes (23 %).
Nombre annuel
1980 1990 2000
H F H F H F
________________________________________________________________________________
lèvres
bouche 12 795 1 384 12
798 1 807 12 990 2398
pharynx
5 341 588 4 736 649 4
341 749
________________________________________________________________________________
œsophage 4
984 473 4 491 656 4 040 928
4 786 608 4 172 647 3
724 710
________________________________________________________________________________
larynx 4
365 299 4 147 325 3 865 361
3 874 177 2 764 170 1
968 166
________________________________________________________________________________
poumon 16
395 1 629 19 315 2
703 23 152 4 591
15 473 1 997 18 469 2 873 22
649 4 515
foie 1
544 412 2 836 628 5 014 962
2 534 1 150 4 033 1 346 6
287 1 563
_________________________________________________________________________________
prostate 10
856 19
499 40
309
6
979 8
790 10
004
__________________________________________________________________________________
sein 21
211 29
617 41
845
8 629 10
059 11
637
____________________________________________________________________________________
mélanome 777 1 476 1
543 2 415 3 066 4 165
de la peau 318 348 480 484 704 660
____________________________________________________________________________________
lymphome 2
101 1 833 3 403 2
866 5 527 4 381
non hodgkinien 989 793 1
661 1 505 2 664 2 57
des cancers 75 264 49
880 82 175 53 521 92 311 57 734
Entre 1980 et 2000 :
progression
du nombre de cancers : 63 %
progression
des décès : 20 %
------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Comparaisons européennes de mortalité par
cancers :
- les hommes français ont le taux de décès
par cancers le plus élevé des pays de l’U.E. : il est supérieur de 50 % à
celui de la Suède et de 20 % à celui du Royaume uni ;
- les
cancers des voies aéro-digestives supérieures, du foie et du poumon (cancers en
rapport essentiellement avec le tabac et les boissons alcooliques et plus
particulièrement le vin ) en sont en majorité responsables ;
- les femmes françaises se distinguent, elles, par la progression la plus rapide des taux de décès par cancer du poumon ;
- l’étude sur la survie des patients cancéreux montre, en revanche, (pour la période 1990-1994), un léger avantage pour les Françaises face au cancer du sein (79 % de survie à cinq ans contre 75 % en moyenne).
-----------------------------------------------------Pour revenir au sommaire cliquez ici
Les cancers sont - et resteront
sans doute pendant très longtemps - des maladies très graves malgré les progrès
thérapeutiques qui ne manqueront pas d'intervenir.
C'est dire l'importance de la
prévention.
Comme on a pu le voir dans les
pages précédentes, nos connaissances quant aux causes concrètes des cancers
sont aujourd'hui fort importantes : faciles à acquérir par tous, elles
permettent à ceux qui les suivent d'éviter un grand nombre de ces tumeurs.
Par ailleurs, les mesures
pratiques de dépistage préconisées à l'heure actuelle par le corps médical et
les pouvoirs publics sont souvent capables d'assurer un diagnostic précoce de
la maladie : c'est le gage le plus sûr d'un traitement efficace et d'une
guérison définitive.
--------------------------------------------------Pour revenir au sommaire cliquez ici
--------------------------------------------------Dr A. Gaillard – Médecin honoraire du CHU de Nantes – juillet 2009
Sur ce sujet de « La prévention des cancers », nous vous recommandons de consulter aussi les sites Web :
- de la Fédération des Centres de lutte contre le cancer
- de la Ligue contre le cancer